Encéphalites auto- immunes a anticorps anti- NMDAR et anti-VGKC : Etude de 2 cas
Moualek D, Mouhouche I, Hecham N, Saadi A, Bouakaz I, Nouioua S, Assami S, Ali Pacha L
Service de Neurologie CHU Mustapha Bacha- Alger
Introduction
Les encéphalites associées aux anticorps anti - NMDAR (N-methyl-D-aspartate receptor) et aux anticorps anti-VGKC (anti-canal potassique voltage-dépendant) sont rares, de description récente, d’origine auto-immune, caractérisées selon la classification des encéphalites auto-immunes par des signes neurologiques centraux associés à des anticorps ciblant des protéines exprimées à la surface des neurones et plus particulièrement à la synapse principalement des récepteurs aux neurotransmetteurs) (1). L’ association a un cancer est très rare (teratome ovarien, thymome…) (1).
La présentation la plus caractéristique est l'atteinte dite limbique, qui se manifeste par des crises d'épilepsie d'origine temporale interne, des symptômes psychiatriques qui expliquent que les patients sont souvent adressés en psychiatrie, classiquement d’installation subaigu, qui peuvent se combiner avec des signes extra-limbiques, réalisant des tableaux cliniques variables
( troubles cognitifs, ataxie, mouvements anormaux,…….).
L’ encéphalite auto-immune a anticorps anti-NMDAR officiellement décrite et nommée par Josep Dalmau en 2007 (1) est la plus fréquente et affecte particulièrement les femmes jeunes et les enfants (2). Elle débute par des troubles psychiatriques suivis d'une phase où alternent mutisme, catatonie , agitation, dysautonomie, hypoventilation et des mouvements anormaux en particulier oro-faciaux très évocateurs (3).
L’ encéphalite auto-immune a anticorps anti-LGI1 (Leucine-Rich Glioma-Inactivated Protein 1) qui fait partie intégrante du sous-groupe des anti VGKC [avec les Anti-CASPR2 (anti-contactin-associated protein-like) ] est plus rare, environ 300 cas sont rapportes (4) et concerne majoritairement les hommes d'un âge moyen qui se situe autour de la soixantaine et débute par des crises toniques facio-brachiales ou temporales (3).
L'IRM cérébrale peut être normale ou montrer des hypersignaux T2 hippocampiques ou corticaux et sous corticaux multiples. La normalité du LCR n'exclue pas le diagnostic qui est confirmé par la mise en évidence des auto-anticorps dans le sérum et le LCR.
La prise en charge thérapeutique repose sur les corticoïdes (souvent en bolus) , les immunoglobulines intraveineuses (Ig IV) et les échanges plasmatiques en première ligne avec le plus souvent une amélioration mais des traitements de deuxième ligne: cyclophosphamide et rituximab peuvent être parfois nécessaires (3) .
Observations
Nous rapportons l’observation de 2 cas, qui présentent une encéphalite auto-immune, ayant bénéficier d’un bilan étiologique: Une IRM cérébrale et médullaire, un EEG, un bilan biologique standard, des sérologies , un bilan inflammatoire et thyroïdien, une étude cytochimique et immunologique du LCR, un bilan paranéoplasique (marqueurs tumoraux, TDM/TAP, échographie testiculaire ) et une recherche d’anticorps anti neuronaux dans le sérum et ou le LCR et ayant reçu un traitement médical par corticoïdes et Ig IV.
Cas 1
Le patient LS est âgé de 73 ans, originaire et demeurant a Brouira, maçon de profession, marié, père de 9 EVBP, aux personnels d’HTA bien équilibrée sous traitement , sans antécédents pathologiques familiaux particuliers.
Le début des troubles remonte a 2 mois avant son hospitalisation marqué par l’installation subaigüe dans un contexte apyrétique de troubles mnésiques, une insomnie et des troubles psychiatriques a type de troubles du comportement, anxiété et agitation, évoluant rapidement vers l’aggravation, et depuis un mois il présente des secousses musculaires brèves des membres inferieurs.
L’ examen neurologique et les tests neuropsychologiques ont révélé, une atteinte des fonctions cognitives , une confusion mentale avec désorientation temporo-spatiale sans signes de focalisation.
Cas 2
L’enfant L Zineddine est âgé de 12 ans, originaire et demeurant a Alger, l’ainé d’une fratrie de 5 EVBP, issu d’un mariage consanguin, sans autres cas similaires dans la famille, scolarisé en 2 eme année primaire avec difficultés scolaires , sans troubles du développement psychomoteur.
Il est suivi en consultation de neuropédiatrie pour encéphalite d’origine auto immune probable survenue en 2012 soit a l’ âge de 4 ans suite a la survenue de façon subaigüe de crises d’ épilepsie motrices partielles secondairement généralisées sévères, de troubles du comportement avec agitation, agressivité, automutilations, des mouvements anormaux d’allure choréiques et dystoniques puis arrêt de la marche et mutisme sans notion de fièvre. L’IRM cérébrale était normale a 2 reprises.
le bilan étiologique a la recherche d’une cause infectieuse ou métabolique notamment une cytopathie mitochondriale , réalisé en pédiatrie s’est révélé négatif. Le diagnostic d’une étiologie auto-immune a été alors suspectée d’où l’administration de plusieurs cures d’Ig IV associées a un traitement antiépileptique, conduisant a une régression totale des signes neurologiques et des crises d’ épilepsie .
En juillet 2020 (âge de 12 ans), alors qu’il était scolarisé, réapparition de façon subaigue et sans notion de fièvre de crises d’ épilepsie et troubles du comportement de même type mais d’intensité modérée avec installation de troubles de la marche et du langage.
L’ examen neurologique et les tests neuropsychologiques ont révélé une aphasie non fluente avec un langage très réduit, la compréhension était altérée, et un syndrome cérébelleux statique et cinétique important altérant la marche.
Discussion
L’orientation diagnostique vers une encéphalite auto-immune chez les 2 patients reposait sur l’installation subaiguë de troubles cognitifs, psychiatriques et de crises épileptiques, une imagerie cérébrale anormale (atteinte limbique chez le cas 1 et cérébelleuse chez le cas 2), permettant une orientation vers une étiologie immunologique qui a été confirmée grâce a la présence d’ auto-anticorps anti-VGKC (cas1) et anti-NMDAR ( cas 2) (tableau 1).
Notre présentation supporte certaines données de ces syndromes notamment:
- La variabilité clinique (un âge de début tardif chez le cas 1 et un âge de début jeune chez le cas 2) (2,3).
- La variabilité immunologique: auto-anticorps anti-VGKC chez le cas 1 et anti-NMDAR chez le cas 2.
- La variabilité neuroradiologique: les hyper signaux au niveau du lobe temporal interne, représentent les anomalies les plus fréquentes alors que l’ atteinte cérébelleuse est
exceptionnelle.
Les encéphalites auto-immunes sont très souvent sous diagnostiquées et peuvent être déroutantes en orientant vers une affection psychiatrique chez l’adulte ou métabolique chez l’enfant. Chez le cas 2 qui présente une encéphalite a anticorps anti-NMDAR a rechutes , le diagnostic de mitochondriopathie a été d’abord évoqué retardant ainsi la prise en charge thérapeutique.
Une amélioration rapide sous traitement médical a été constaté chez les 2 cas malgré la variabilité immunologique (tableau 1). Il a bien été rapporté que l’instauration rapide d’un traitement précoce améliore le pronostic des patients (6).
Conclusion
Les encéphalites auto-immunes sont caractérisées par une grande diversité clinique et immunologique. Leur diagnostic est confirmé grâce a la détection des auto-anticorps dont la présence est essentielle pour une prise en charge précoce et efficace réduisant ainsi les errances diagnostiques.
Références
1/ Muñiz-Castrillo S et al. Diagnosis of autoimmune encephalitides: An update. Pratique Neurologique – FMC 2020; xx:1–11 (article in press).
2/ Josep Dalmau, Erdem Tüzün, Hai-yan Wu, Jaime Masjuan, Jeffrey E. Rossi, Alfredo Voloschin, Joachim M.
Baehring, Haruo Shimazaki, Reiji Koide, Dale King, Warren Mason, Lauren H. Sansing, Marc A. Dichter, Myrna R. Rosenfeld et David R. Lynch, « Paraneoplastic anti-N-methyl-D-aspartate receptor encephalitis associated with ovarian teratoma », Annals of Neurology, vol. 61, no 1, 2007, p. 25–36.
3/Antoine J.-C. Les encéphalites auto-immunes avec auto-anticorps:Tableau xclinique xet stratégie diagnostique et thérapeutique, Pratique Neurologique 2018;9 : 81–87
4/ Bastiaansen AEM, van Sonderen A, Titulaer MJ. Autoimmune encephalitis with anti-leucine-rich glioma-inactivated 1 or anti-contactin-associated protein-like 2 antibodies (formerly called voltage-gated potassium channel-complex antibodies). Curr Opin Neurol 2017;30:302–9.
5/Graus F, Titulaer MJ, Balu R, Benseler S, Bien CG, Cellucci T, et al. A clinical approach to diagnosis of autoimmune encephalitis. Lancet Neurol 2016;15:391–404.
Dr. Dalila MOUALEK
Service de Neurologie CHU Mustapha Bacha- Alger
Un cas évoquant le syndrome de Tolosa-Hunt
Association des Neurologues Privés d’Alger "ANPA"
webinaire - algérié , 2020-11-27 jusqu'a 2020-11-27
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